Vous reprendrez bien du Métamitrone ?

C'est dans l'air à Phalempin.

L'information sur les produits phytopharmaceutiques (communément appelés "pesticides") potentiellement utilisés sur le territoire français vient de faire un immense progrès avec la mise en ligne fin février 2025 de l'outil Géophyto par l'association Générations Futures.
La Loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006 oblige les distributeurs agréés pour ces produits à déclarer aux agences de l'eau les ventes effectuées par code postal des acheteurs. 
Les données ainsi collectées constituent la Banque Nationale des Ventes distributeurs (BNV-d), dont l'exploitation a été réalisée pour Géophyto.
La connaissance des produits achetés chaque année pour le code postal 59133 (Phalempin + Camphin-en-Carembault) donne une assez bonne indication des produits qui sont pulvérisés sur les terres agricoles qui nous entourent. Les différences par rapport à la réalité peuvent résider dans des achats qui ne seraient pas utilisés immédiatement et donc stockés ou par des stocks antérieurs utilisés, ainsi que par la pulvérisation à Phalempin et Camphin de produits apportés par des agriculteurs non résidents (belges notamment). 
Les données détaillées pour 2022, et l'évolution pour le total des ventes entre 2015 et 2022 sur Phalempin + Camphin, sont présentées plus bas (Source Géophyto, Générations Futures).
Voici quelques précisions sur les principales substances utilisées autour de chez nous :
- Le prosulfocarbe (368 kg en 2022 pour nos deux communes !) est la deuxième substance active herbicide la plus vendue en France. Les produits à base de prosulfocarbe sont essentiellement utilisés sur les cultures de céréales, de pommes de terre et sur certaines cultures légumières. L’Anses a mené plusieurs actions en lien avec ces produits depuis 2017, pour deux raisons principales : du fait des grandes superficies traitées et des doses employées à l’hectare, et de la volatilité importante de la substance active, qui favorise sa dispersion dans l’air y compris après l’application. L’Anses a fait figurer le prosulfocarbe dans la liste des substances phytopharmaceutiques méritant une attention particulière dans son rapport sur les substances préoccupantes de 2020.
- Le Métamitrone (118 kg en 2022 pour nos deux communes) est un herbicide utilisé principalement pour les cultures de betteraves sucrières. Il est fortement toxique, notamment pour les milieux aquatiques. Le délai de Rentrée est de 6 heures : c'est le délai minimal que les travailleurs agricoles doivent respecter avant de rentrer dans la parcelle traitée afin de limiter leur exposition aux produits toxiques encore présents. Notons que les riverains immédiats de ces parcelles ne sont pas informés !
- Le Propamocarbe hydrochloryde (101 kg en 2022 pour nos deux communes) est un fongicide a priori faiblement toxique, mais irritant pour les yeux.
- L'Aclonifen (94 kg en 2022 pour nos deux communes) est un herbicide qui appartient à la famille chimique des diphényl éthers. Cette substance est suspectée de cancérogénicité par les agences réglementaires européennes.
On remarque que le Glyphosate est la 7ème substance la plus achetée en 2022, avec 81 kg pour nos deux seules communes. Vous ne pouvez plus en utiliser dans votre jardin et c'est très bien, mais ce n'est pas le cas autour de nous !
Nous n'accusons pas les agriculteurs, prisonniers d'un système organisé par l'agrochimie, mais les décideurs politiques, coupables souvent d'inaction et parfois de collusion avec des lobbys financièrement puissants (voir par exemple les votes de la droite et de l'extrême droite aux parlements français et européens, en faveur du maintien des pesticides).
Heureusement, les choses bougent parfois et certaines collectivités interviennent pour soutenir les agriculteurs qui s'engagent à faire évoluer leurs pratiques. 
Ainsi, la Métropole Européenne de Lille vient d'adopter le 28 février 2025 sa nouvelle Stratégie Agricole et Alimentaire. Elle investit 1,2 million d'euros dès 2025 pour une agriculture durable. La MEL met désormais en œuvre un soutien aux pratiques agroécologiques : il s’agit notamment des Paiements pour Services Environnementaux (PSE), qui rétribuent les agriculteurs adoptant des pratiques plus respectueuses de l’environnement expérimentées sur les territoire des communes Gardiennes de l’eau. L’objectif est d’aider 20 agriculteurs par an jusqu’en 2030, avec un budget qui augmentera progressivement, passant de 120 000 € en 2026 à 600 000 € en 2030, grâce à des financements notamment de l’Agence de l’Eau. 
Mais Phalempin n'est pas dans la MEL et rien de tel n'est hélas prévu chez nous !
Philippe Rigaud